Le PS à « Tournez manège »

Écrit le 29 mars 2008 par Jiceo

Avec qui vais-je me marier ? A en croire journaux et commentateurs, relais des hiérarques du parti, le PS une fois de plus court à l’échec à s’interroger à l’infini sur ses alliances. Avec qui vais-je me marier? L’extrême gauche ou le centre? Il paraît même que certains rêvent d’un ménage à trois: centristes, socialistes, gauchistes, voire davantage si on a bien lu. Retour à la bonne vieille communauté hippie, avec le PS à la guitare, l’extrême gauche au tam-tam, les écolos à la culture du chanvre et les centristes à la popote. Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Un patchwork idéal assurément pour entonner la belle rhétorique morale, justification éternelle de l’irresponsabilité politique. S’interroger à l’infini sur ses alliances en s’efforçant de ménager la chèvre et le chou, c’est refuser de décider. C’est se mettre en situation de ne jamais exercer le pouvoir et se complaire dans une opposition perpétuelle.

Comme toujours… Rien que du très banal, comme toujours, car pour faire avancer un tel attelage… de Bayrou à Besancenot.

Quelle alliance ? Pour quoi faire ?

Remarquez il y a déjà un petit progrès, puisqu’au moins la question de l’alliance se pose désormais. Jusqu’en 2007 seul le mariage avec, comment disent-ils, la gauche de la gauche était envisageable. Qui elle évidemment sûre de sa beauté supérieure repoussait avec morgue ce vieux crouton social-démocrate, avec qui elle ne pouvait s’imaginer coucher. Un mariage arrangé en quelque sorte, impossible à vivre mais seul autorisé par la tradition; comme dans les vieilles sociétés rurales. Bien la peine de se faire le chantre du changement social quand on est soi-même dépendant de vieux schémas surannés.

Quoi qu’il en soit le progrès, si progrès il y a, demeure mince. Car bizarrement, si la question des alliances se pose enfin, on évite soigneusement de se demander pour quoi faire. Ou ceux qui se le demandent espèrent une fois de plus passer sous silence la question pour prendre la tête du parti, dans l’espoir vain que le principe de réalité jaillira ensuite tout seul chez ceux qui s’évertuent à le fuir. Comme si ce non-dit-là ne pesait pas déjà depuis des lustres sur la vieille gauche française, inhibant sa capacité d’adaptation.

Si le PS veut vraiment exercer les responsabilités qui découlent de sa nature de parti politique il doit commencer par abandonner son indécision foncière. Regarder en face les contraintes du monde vivant, et en faire le point de départ de son discours politique, puis de son action politique. Impossible d’incarner en même temps l’intransigeante conscience morale du monde et l’action politique dont la nature est de transiger en permanence. Si la nature du Parti socialiste est de faire de la politique alors il doit décider lui, de se mettre en état de décider pour le pays; ce qui exige d’inclure dans la culture du parti la possibilité de l’échec, dont le corollaire est l’abandon de la posture « conscience morale du monde ». Le PS doit choisir ou d’être une nature vivante ou d’être une nature morte. Il ne peut plus être les deux en même temps. Cela commence par la mise en concordance du discours et des pratiques. Si l’enjeu c’est de travailler à l’amélioration sociale de l’humanité, il doit commencer par se donner les moyens de jouer son rôle politique. D’abord gagner les élections, donc se mettre en phase avec le pays. Et ensuite mettre la main à la pâte. Ce qui inclut le risque de se les salir.

Un parti de gouvernement

Le PS doit devenir lui-même. S’il veut jouer son rôle de parti de gouvernement, guidé par le désir légitime d’améliorer la vie des citoyens, il ne peut plus faire semblant d’ignorer à quelles conditions les améliorations sociales qu’il promet pourraient se réaliser. Il regagnerait du crédit à devenir lui-même: un parti de gouvernement, ce qui suppose de tenir au pays un discours de parti de gouvernement. Mettre en cohérence pratique et discours voilà le travail à réaliser. Ce qui en chemin impose de s’émanciper de l’emprise intellectuelle aliénante de l’extrême gauche, stérilisante au final.

Le PS doit travailler à retrouver le crédit qu’il a perdu en un quart de siècle de pouvoir (depuis 1981). A pratiquer une politique pour l’essentiel pragmatique (hormis les 35h que la pays traîne comme un boulet) tout en tenant un discours pseudoradical et moralisateur on perd sur tous les tableaux. D’abord auprès de ceux qu’on voudrait ainsi séduire. Il est impossible de séduire les gauchistes aux petits pieds*, puisque qu’ils cultivent un état d’insatisfaction permanente. Rien à gratter de ce côté-là. Le PS doit devenir un parti de gouvernement; se comporter comme tel; parler comme tel. Laisser les trotskystes à leurs reliques rhétoriques marxisantes et revenir dans le monde vivant.

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* Les petits pieds ça sert juste à porter des baskets pour les manifs. Ce qu’on appelle penser avec les pieds.

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